Résumé du colloque 1997

VIVANT DENON, Colloque de Chalon-sur-Saône du 22 mars 1997. Textes recueillis par Francis Claudon et Bernard Bailly. Comité National pour le développement de la recherche et des études sur la vie et l’œuvre de Vivant Denon et Université pour Tous de Bourgogne, Centre de Chalon sur Saône, 2èmeédition, 2005

 

 

Avant-propos par Pierre LELIEVRE, p 9-11

« Denon nous apparaît comme un incomparable représentant de l’insatiable curiosité des Lumières, acteur, animateur et narrateur du plus beau musée du monde ».  

 

Introduction. Vivant Denon, les discrétions d’un bourguignon par Francis CLAUDON, p 13-19, 6 références

En introduction au colloque réalisé à l’occasion du 250ème anniversaire de sa naissance, F Claudon rappelle quelques éléments de la biographie de Dominique Vivant Denon et souligne sa personnalité polymorphe telles qu’étaient celles de Colette et de Bussy-Rabutin, sa faculté de « ne jamais se mettre en avant » mais « savoir se rendre opportun » et son sens de l’état comme celui de Monge et de Lamartine, tous des bourguignons célèbres.

 

Vivant Denon collectionneur ou l’autoportrait en amateur par François MOUREAU, p 21-34 , 57 références.

Les collections personnelles de Vivant Denon ont été dispersées pour l’essentiel lors de trois ventes : tableaux et dessins en mai 1826, objets (« les Monuments ») en janvier 1827 et estampes en février 1827. Les experts liés au marché de l’art parisien et aux musées étaient respectivement Alexis-Nicolas Pérignon, LJJ Dubois et Jean Duchesne. Selon F Moureau, on reconstitue aisément l’itinéraire personnel de Denon au fil des catalogues, Denon qui d’ailleurs ne se privait pas d’être portraituré « dans ses oeuvres » de pilleur impérial. L’auteur énumère de très nombreuses tableaux et objets décrits dans les catalogues pour illustrer l’éclectisme de Denon, curieux de tout, qui signalait par un astérisque les pièces qu’il avait faites lithographier dans la perspective de son histoire illustrée des arts.

 

Denon et les Monuments des arts du dessin par Marie-Hélène GIRARD, p 35-50 , 38 références

En 1829, Amaury-Duval et le général Brunet-Denon, neveu et héritier de D V Denon, publièrent à titre posthume quatre grands in-folio qui rassemblent 310 lithographies que Denon projetait de publier. La genèse de l’ouvrage est assez mal connue. Denon n’avait pas laissé de plan pour présenter les lithographies qu’il avait fait réaliser de ces « monuments », comprendre « ce qui est destiné à rester », dans ce qu’on appellera plus tard Histoire de l’art. Le plan de classement et les commentaires sont d’Amaury-Duval. Dans cette contribution, MH Girard souligne « une assez grande méconnaissance de l’iconographie », « le réquisitoire contre le romantisme » et les préjugés néo-classiques d’Amaury-Duval. Denon est décrit comme un « esprit beaucoup plus souple, plus curieux, plus encyclopédique aussi, et surtout comme un connaisseur en tableaux ».

 

Denon et la propagande par Elaine WILLIAMSON, p 51-61, 33 références

Pourquoi après le refus du peintre David et du sculpteur Canova le choix de Napoléon Bonaparte pour diriger le Musée central des Arts s’est-il arrêté sur Denon ? Les arts jouent-ils un rôle dans la pérennisation d’un grand moment politique ? Le lieu où la gloire de Napoléon et celle de la nation seraient réunies justifierait-il de « fausses représentations d’événements réels » ? C’est à ces questions que répond E Williamson dans sa contribution.

 

Denon en 1806 chez Goethe à Weimar par Manfred NAUMANN, p 63-75, 54 références

Trois jours après la bataille d’Iéna (14 octobre 1806) Denon demandait au général Dentzel un « billet de logement » chez son ami Goethe à Weimar situé à une douzaine de kilomètres d’Iéna, dans le duché de Thuringe. Le duc de Weimar avait mis son armée au service des prussiens, Goethe et les weimariens craignaient les représailles. Goethe présenta son ami à la Duchesse et Denon proposa de mettre en jeu ses bons rapports avec le général Clarke commandant de la ville d’Erfurt. Weimar et son université furent épargnés. Dans cette contribution, M Naumann commente les notes de Gottfried Schadow, directeur de l’Académie berlinoise des arts avec qui Denon organisa le transfert des objets d’art à Paris. M Naumann rapporte aussi la satisfaction de Charles-Auguste, grand-duc de Weimar, lorsqu’il reçut les mille médailles à son effigie que Denon avait fait graver.  

 

La Rome théorique de Vivant Denon par Letizia NORCI CAGIANO DE AZEVEDO, p 77-86, 28 références

« Denon n’a pas compris, mais il n’était pas le seul, que l’éternité de Rome consiste en son éternel délabrement », ainsi L Norci Cagiano de Azevedo conclut-elle sa contribution. La Rome idéale de Denon est celle de ses études humanistes avec l’abbé Buisson et des gravures de la Rome antique qui circulaient au XVIIIème siècle. Denon déplorait que l’Eglise ait utilisé des éléments de temples pour bâtir des bâtiments religieux et montrait peu d’enthousiasme pour les fouilles archéologiques qui ne présentaient plus de nouveautés. Il est vrai que Denon séjourna peu à Rome et qu’il ne vit pas le nouvel aménagement du Musée Chiaramonti au Vatican « conçu d’ailleurs selon les vieux critères esthétiques, complètement différents de la conception historique et de la division par écoles qu’il adoptait pour le Louvre ».

 

Vivant Denon, homme de lettres par Martine REID, p 87-93, 8 références

La seule correspondance de Denon connue du public a été pendant longtemps celle de Denon jeune (28 ans) avec Voltaire (84 ans) publiée dans  Monuments des arts du dessin . En 1990, Mario Dal Corso a publié 50 lettres découvertes à la bibliothèque de Vérone, courriers que Denon avait adressés à son amie venisienne Isabella Teotochi de 1792 à 1825. Un autre lot de 300 lettres à Isabelle Teotochi , découvert dans le fonds Piancastelli de la bibliothèque de Forli, était en cours de publication chez Actes Sud en 1998 par Fausta Garavini. M Reid souligne l’intérêt biographique de ces lettres et « l’affection sans faille [de Denon pour Isabella] dans la vie, l’exact opposé en somme de Point de lendemain. »

 

Le voyage en Sicile de Vivant Denon par Diana MARTINEZ-RAPOSO, p 95-103, 7 références

Sur la proposition de l’abbé Saint Non, Vivant Denon dirige en Sicile, du 2 mai au 4 septembre 1778, une équipe de savants et d’artistes français (les architectes Renard et Després, les peintres Châtelet et Fragonard et le géologue Dolomieu,) dans le but de publier une œuvre exhaustive sur le Royaume de Naples et de Sicile. L’originalité du journal de voyage que tient Denon consiste dans la multiplicité de ses curiosités qui ne délaisse aucun aspect de la vie insulaire : les difficultés liées au transport et à l’hébergement, le sirocco, les coutumes locales, la vénalité de la justice mais aussi la stupeur et l’émerveillement devant les ruines de Sélimonte et des observations scientifiques sur les plantes et les minéraux. D Martinez-Raposo soutient sa contribution par de nombreuses citations du Voyage en Sicile.

 

Le voyage en Sicile de Vivant Denon, genèse et accueil par Philippe GOUDEY, p 105-111, 28 références

Vivant Denon avait accepté la proposition de l’abbé de Saint-Non de diriger et de relater le voyage en Sicile à condition que son nom ne soit pas cité car il commençait une autre étape de sa vie à Naples. Lorsque le premier des cinq volumes du  Voyage pittoresque ou descriptions des royaume de Naples et de Sicile parait, le texte n’est pas signé et le journal de voyage de Denon profondément remanié. La réaction de Denon a été vive et le texte authentique de Denon sort en 1788 sous le titre de Voyage en Sicile. Les analyses d’Hélène Tuzet, Toso Rodinis, Amin Ghali, Pierre Rosenberg, Philippe Sollers, Patrick Mauriés et Georges Vallet sont brièvement évoquées par P Goudey.

 

Anecdotes et rythme de la narration dans le Voyage dans la Basse et la Haute Egypte de Dominique Vivant Denon (1802), par Daniel CLAUSTRE, p 113-123, 24 références

Selon D Claustre, la lecture du Voyage dans la Basse et Haute Egypte laisse une impression de disparate… On y trouve des descriptions de paysages, de monuments, de batailles, des réflexions, de véritables discussions ainsi qu’une trentaine d’anecdotes. En effet, Denon estime que : « c’est par des anecdotes plutôt que par des discussions que l’on peut développer l’influence des religions et des lois sur les peuples ». Au fil des anecdotes citées par Claustre, Denon raconte : le naufrage d’une embarcation, la magnificence d’Alexandrie, la fourberie et la cruauté des musulmans, l’infidélité des femmes, l’intérêt du langage d’honnêteté avec les marchands et paternaliste avec le peuple. Ces anecdotes donnent un temps de réflexion au lecteur entrainé par le rythme militaire de l’expédition.

 

Les bédouins dans le Voyage dans la Basse et la Haute Egypte (texte et images), par Sarga MOUSSA, p 125-135, 38 références

Analyses des planches 29, 54 bis, 102, 104, 105,108, 109, 110

Fidèle à l’esprit des Lumières, Denon a une vision idéalisée du bédouin, l’arabe nomade : hospitalier, vertueux, vivant librement et simplement, vision contraire aux représentations antérieures issues en grande partie d’une conception biblique largement négative du désert.

 

Dominique Vivant Denon et les sciences de la terre, par Madeleine PINAULT-SORENSEN, p 137-171, 111 références, 10 illustrations

Denon s’intéresse aux mouvements de la terre (volcans, désert, grottes, cours d’eau) et à la minéralogie (marbres, lave, soufre, scories, salines). Ses descriptions littéraires sont celles d’un peintre : panoramiques. Proche de ses contemporains, il aime intégrer les ruines aux paysages naturels. Il émaille ses observations de références à la mythologie : Bacchus, Proserpine, les Champs-Elysées, Calypso, etc… Il met en rapport le climat et le caractère des hommes. Ses portraits de savants illustres qu’il a rencontrés, Dolonieu, Humbolt et Hamilton, sont reproduits dans les actes du colloque.